750 grammes
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L'enfer du goût

30 avril 2011

La stratégie des alliances

 Etre « dans la merde » est un langage courant de cuisinier, mais il faut toujours parvenir à s’en sortir seul ou éventuellement à trouver des alliés de confiance. 

« Etre dans la merde » : En cuisine l’expression est souvent utilisée dans deux cas bien précis :

-        -   Lorsque le cuisinier à énormément de mise en place à faire pour le service, et qu’il doit donc tout préparer en même temps.  Il arrive que dans ce cas là, la cuisine devienne une sorte de champs de bataille ; le cuisinier s’agite, s’accélère,  et éventuellement foire des trucs,  ce qui le met encore plus « dans la merde ».

-       -   Lorsque pendant le service, le cuisinier ne peut plus suivre les bons qui arrivent les un après les autres. Le cuisinier est alors dépassé.  A ce moment précis deux types de comportement se dégagent:l’attitude sereine et adulte genre « je gère, et je maitrise la situation CALMEMENT », ou l’attitude je m’énerve, et je dis des phrases du style « ça me casse les couilles ! mais bordel ! je vais me casser d’ici ! » et cela en balançant les poêles à droite et à gauche.

fr Réussir à se débrouiller seule lorsqu’on est « dans la merde », c’est un peu montrer que l’on est pas nul. Surtout lorsqu’on débute, on ne sait pas encore qu’on à le droit de demander de l’aide. Et puis les cuisiniers aiment bien dire « rhoo j’ai fait 60 couverts tout seul aujourd’hui !». C’est un peu l’exploit de la performance ! 

 

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25 juin 2010

Tous des voleurs

En cuisine la confiance se gagne. On est d’abord coupable et il faut prouver son innocence. Le nouveau est toujours observé du coin de l’œil, scruté, étudié. On sait que le nouveau va se planter  mais on ne sait pas quand.

Le nouveau c’est celui qui peut tout déranger, tout bruler, tout jeter,  tout casser, parler trop, fumer trop, et même voler !

Alors il faut passer les étapes une à une : ne pas tout déranger, ne pas tout bruler, ne pas tout jeter, ne pas tout casser, ne pas trop parler, ne pas trop fumer et ne pas tout voler ! Et tout cela dans les règles de l’art : sans trop poser de questions et prouver sa capacité à être invisible.

Si il y a toujours ce ton sec dans une cuisine qui peut surprendre, c’est parce qu’il Il faut un temps avant qu’un cuisinier se détende et se dévoile.

Le nouveau est  testé sur sa capacité à écouter, observer, réagir. Il est testé sur sa régularité, sa propreté, son organisation, son adaptation, sa bonne foi, sa technique, ses connaissances. Ce n’est que plus tard, éventuellement, qu’il sera testé sur son art culinaire et sa capacité à cuisiner ! Gagner l’estime d’un cuisinier c’est s’assurer qu’il ne vous fera pas vivre un enfer, qu’il vous aidera et peut-être il vous transmettra son savoir.

25 juin 2010

La sauce suprême

Prendre une russe et diluer du fond blanc dans de l’eau. Réduire de 2/3. Pendant ce temps faire un roux blanc tant pour tant farine et beurre. Laisser le roux refroidir. Incorporer le fond blanc au roux avec un fouet,  réduire. Incorporer de la crème liquide et réduire à nouveau. Eventuellement passer la sauce au chinois. Terminer la sauce hors du feu en la montant au beurre.

22 juin 2010

guimauve

Dans la cuisine, je stressais toujours énormément. Je courais, montais, re-descendais, re-montais, re-descendais les escaliers. J’arrivais à mon poste les bras plein de légumes, de paquets, de sauces, des trucs. Je me disais toujours « on ne sait jamais… ». Et je voyais le sous-chef se dire dans sa tête en me regardant « c’est quoi tout ça… ». Et je courais à droite et à gauche, sous l’œil amusé des maliens qui eux n’avaient pas l’air stressé du tout, discutaient, prenaient leur temps. Mais comment faisaient-ils ? J’avais tellement de choses à préparer, pourquoi eux ne semblaient rien faire ?


Je venais en avance, pour être bien sûre d’être prête à l’heure. Je me battais avec des machines. La plus méchante était la hacheuse à steak haché (ou tartare). Avec elle, il fallait monter les pièces dans le bon sens, et si l’on se trompait, elle se coinçait et je perdais une demi-heure à tout décoincer, à tout démonter. Etrangement jamais personne ne passait dans les couloirs à ce moment là. Je devais donc me débrouiller seule, et je piquais quelque guimauves à la fleur d’oranger.

L’autre machine assez méchante, était la machine à « mettre sous vide ». On avait une préparation, qui pouvait être une sauce, des légumes, des herbes, que la machine scellait par magie dans des portions plastique sous-vide. Le problème avec cette machine était que si l’on positionnait mal le plastique celui-ci avait tendance à exploser, et les ingrédients dedans avec. Le plus chiant c’était les sauces, quand ça éclatait, ca surprenait, et là on avait envie de devenir invisible.

22 juin 2010

Invisible

En cuisine il faut être invisible et on ne voit pas avec les yeux. On reconnait quelqu’un à son ombre, à son geste, sa démarche au  son qu’il fait.

Sans se retourner, les cuisiniers peuvent deviner l’identité d’une personne, savoir si elle est malade, stressé, en forme. C’est un truc qui vient avec la pratique. On ne peut pas trop mentir dans une cuisine, mais on peut être invisible.

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21 juin 2010

sauce

Dans les premiers temps, trouver un produit relevait de l’exploit pour moi. Je demandais souvent où se trouvait telle sauce (ou comment il fallait la faire) à mon « chef de partie qui connaissait le poste mieux que sa maison ». Il me répondait toujours « c’est bon, c’est bon ». Etrangement, je ne savais pas trop s’il fallait que je me contente d’une telle réponse.

Mais c’est à force de le questionner – et je sentais que je le saoulais – que j’obtenue de nouvelles informations sur les sauces. Les sauces se trouvaient « en bas, en bas ». (oui il avait tendance à répéter deux fois les infos).

Je m’aventurais donc un jour « en bas, en bas », à la recherche de la sauce en question, celle qui était « un peu plus épaisse » que les autres. Car il y en avait d’autres, et elles se ressemblaient.

En pleine étude dans cette grande chambre froide, sur la consistance des sauces, le sous chef qui passait par là m’adressa sèchement la parole pour me demander ce que je cherchais.

Le sous-chef était un homme plutôt jeune et joli. Je le trouvais toujours plutôt désagréable et il avait toujours cet air excédé qui semblait démesuré.

Dans les deux secondes il me donna la sauce que je cherchais. Je fus impressionnée. Je repartis avec ma sauce en étudiant son aspect dans l’ascenseur, persuadée que je la retrouverai très facilement la prochaine fois.

19 juin 2010

salade

En arrivant l’après-midi je lavais quatre ou cinq cageots de salade. Il valait mieux prévoir large. L’égouttoir à salade était géant. Dans ce couloir qui sentait le parfum l’on venait me saluer. Je transpirais et me musclait le bras droit. Il fallait faire vite. Après je nettoyais parfaitement le poste. Une feuille de salade qui trainait et j’entendais plus tard : « qu’est ce qui a laisser l’évier degeulasse en bas ! ». Aie ! Je voulais éviter cette remarque à tout prix. Je vérifiais donc toujours qu’il n’y avait plus aucune trace ni de verdure, ni d’eau, ni de parfum, ni d’existence.

19 juin 2010

parfum

Le chef de cuisine était un homme d’une quarantaine d’années. C’est avec lui que j’avais eu mon entretient d’embauche. Comme je n’avais pas de diplôme je me souviens qu’il m’avait dit « et en plus il faut vous former !».

L’homme passait désormais plus de temps dans son bureau que derrière les fourneaux. Quand il arrivait en cuisine pour faire un service, il se transformait littéralement. Il hurlait. Il aboyait. On avait l’impression qu’il passait dans un autre monde. Il avait l’air complètement en transe. Evidemment on se faisait crier dessus, et c’est toujours dans ces moments là que je faisais des conneries.

Je craignais toujours un peu sa présence mais je le pistais grâce à son parfum. En effet, l’homme avait un parfum qui me renseignait toujours sur lui, ses jours de congés et sa présence dans les couloirs.

18 juin 2010

blonde

En arrivant on m’a fait rapidement visiter les lieux ; deux étages, des couloirs, deux ascenseurs, je savais que j’allais me paumer pendant au moins une semaine. Il y avait du monde partout et je ne savais pas qui était chef, qui était commis, qui était qui et pourquoi.

En cuisine, les regards se sont tournés vers moi. Une blonde en cuisine ! Ca ricanait doucement.

On m’a mis aux entrées ; comme tout débutant. Il y avait un chef de partie à ce poste. Il devait me montrer pour que je puisse le remplacer. J’ai compris plus tard qu’il me voyait comme une menace et que c’est pour cela qu’il m’a fait vivre un petit enfer par la suite.

18 juin 2010

PRESENTATIONS

En cuisine on ne dit pas d’accord, mais "ça marche". On dit "oui chef" et on ne discute pas les consignes car on a pas le temps de discuter.

Quand on rentre dans une cuisine, c'est comme si l'on passait la porte d'un autre monde. Il y a du bruit, il fait chaud, il y a des machines partout et des hommes en blanc qui courent dans tout les sens.

Lorsque je suis arrivée dans ce bistrot chic des Champs-Elysées, j'ai vite compris que j'étais un objet de curiosité. La brigade était composé seulement d'hommes : des chefs français et des commis maliens.

La cuisine est un métier; avec ses codes, ses attitudes, son vocabulaire, son éthique. Sans expérience, on se fait vite remarquer et il est facile de déstabiliser les novices.

C'était mon cas; je n'avais pas d'expérience, pas de diplôme de cuisine, et j'étais la seule femme.

Je n'avais pour moi que le sentiment que ma place était ici et que je devais la gagner.

J'étais lâchée dans l'arène et je devais survivre. Par tout les moyens.

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